Rencontre avec une délégation américaine

« Une route a été tracée par la société ; nous la trouvons ouverte devant nous et nous la suivons ; il faudrait plus d’initiative pour prendre à travers les champs ». Citation d’Henri Bergson

Mardi 19 mai 2015, l’association I.D.E.E.S a reçu M. Shaarik H. Zafar , représentant spécial du Département d’Etat Américain et également membre du Conseil des Relations Etrangères. Il était accompagné d’une délégation de 7 personnes. Durant cette rencontre, d’autres associations étaient présentes (El Baraka, Aclefeu), ainsi que des jeunes de Sevran. Récit de cette rencontre autour de thèmes concernant la vie quotidienne.

Présentation des associations

La rencontre a débuté par la présentation des associations présentes. Point commun de chacune : mener des actions sociales, éducatives et culturelles, et vouloir transmettre à toutes les générations la capacité d’apprendre, de travailler et de s’insérer dans la société par différents dispositifs.
Ainsi, deux des associations présentes sont nées suite à des événements tragiques survenus en 2005 pour Aclefeu, et en 2011 pour El Baraka. Evénements qui avaient généré des tensions au sein des quartiers où elles sont installées. Dès lors, le but de ces associations a été de rassembler les citoyens de leur ville, mais aussi au-delà. Faire en sorte que les quartiers s’ouvrent, que les habitants se rencontrent, montent des projets… Elles souhaitent, par dessus tout, montrer que ce qui importe n’est pas l’origine, mais le fait d’être citoyen. Faire que les habitants des quartiers se sentent Français à part entière et non pas Français entièrement à part.
Suite à ces présentations, M. Shaarik H. Zafar a vivement réagi en jugeant que ce que ces associations faisaient était « very very very important », ajoutant que c’était un privilège pour lui et sa délégation d’être là.

La question de barrière sociale et de crise identitaire

M. Shaarik H. Zafar a expliqué qu’aux Etats-Unis, les citoyens étaient très fiers d’être Américains, bien qu’ils ne soient pas parfaits. Ce sentiment d’appartenance est très présent, peu importe la religion et la couleur de peau. Il y a, bien entendu, des discriminations, mais leur société est construite tel que tout le monde puisse travailler et vivre ensemble, peu importe les différences. En France, ce sentiment n’est pas toujours ressenti. L’association El Baraka note que le lieu d’habitation est souvent conditionné par l’origine. Certaines personnes ont parfois « peur d’être Françaises », dans le sens où elles ont l’impression de s’éloigner de leurs origines, alors que ce n’est pas du tout le cas. Aux Etats-Unis, être Américain est ressenti comme une force.

La discussion a porté sur les discriminations, mais aussi sur les préjugés. Pour exemple, le séjour en Bretagne de l’association I.D.E.E.S, où chaque participant a dressé une liste de clichés sur les jeunes de Bretagne, et vise-versa. En échangeant, les jeunes se sont rendus compte que leurs clichés étaient faux, et en ont ri. Une preuve qu’une des choses les plus importantes dans la question de la cohésion sociale, c’est l’échange. La seule barrière sociale qui existe, c’est celle que l’individu se met. Autre exemple, l’une des jeunes présente a répondu à M. Zafar qu’elle n’allait pas ou peu à Paris car ce n’est pas la même culture, le lien social est différent et les préjugés très nombreux. Il lui a répondu qu’il fallait qu’elle aille à Paris, car les personnes doivent se rencontrer et échanger. C’est un besoin. Aller ailleurs ne signifie pas que l’on nous retire notre identité, ni recevoir des gens d’ailleurs.

L’identité sociale : c’est quoi être Français ? Américain ?

L’identité sociale peut être ressentie différemment selon les citoyens. Pour certains, être Français c’est tout d’abord bien plus qu’avoir la simple carte d’identité Française. C’est aussi posséder et partager une culture, la transmettre à travers un ensemble de valeurs comme celle de la devise « Liberté, Egalité, Fraternité ». Pour d’autres, c’est quelque chose de plus difficile quand « on vient d’ailleurs ». On se rend vite compte que les frontières sont nombreuses d’un pays à l’autre, mais aussi d’une ville à l’autre. Souvent, ce n’est qu’une fois à l’étranger que l’on réalise qu’on est Français. Certaines personnes vivant en banlieue ont parfois l’impression que l’on ne leur donne pas la possibilité d’être Français à part entière, et que tout le reste dépend de cette « chose » sur l’identité, alors que nous partageons des valeurs formidables à partir du moment où elles s’appliquent à tous.

M. Zafar est, lui, né au Pakistan, est Américain, et a 2 filles. Il nous indique que bien qu’il ne puisse pas être Président, ses deux filles, elles, le pourront. Il trouve que la devise de la France est belle et que nous avons raison d’en être fiers. Il soutient ces générations qui voudraient participer pleinement à la construction et à l’évolution de ce pays à part entière, sans qu’il n’y ait de conséquences sur leurs origines ou religions, car c’est ce dont a peur une majorité. Pour lui, il pense qu’il faut se mettre debout et se battre pour ses droits, rencontrer d’autres personnes, promouvoir l’échange.

Issue de la rencontre

Shaarik H. Zafar a conclu cette rencontre en soulignant que personne n’est responsable des barrières qui se sont construites et des crises identitaires. Beaucoup de travail reste à faire pour les associations présentes et nos jeunes, pour le combat contre toute forme de discrimination, contre toutes les barrières, et pour nos Droits. D’ailleurs, les associations réalisent déjà ce travail en partie.
En s’adressant aux jeunes, M. Zafar les complimente sur le fait d’être présents, car lui ne l’aurait pas été à leur âge. Pour finir, selon lui, tous ensemble nous pouvons changer les choses et il y a beaucoup d’espoir. Car s’il y a plusieurs centaines de jeunes comme eux, nous réussirons.

« Merci, merci beaucoup. Pour moi, c’est une vraie éducation d’être venu ici. » M. Shaarik H. Zafar.

Remerciements à Fethia, pour cet article écrit à quatre mains.

Pour en savoir plus sur M. Shaarik H. Zafar : http://www.state.gov/r/pa/ei/biog/230768.htm (en anglais)